Un remède tout indiqué

Une initiative novatrice de prescription sociale pourrait permettre d’alléger le fardeau social imposé aux fournisseurs de soins de santé et procurer aux Ontariens un soutien grandement nécessaire.

En vertu de la prescription sociale, les fournisseurs de soins de première ligne identifient les patients qui ont des besoins non médicaux ou sociaux insatisfaits, les impliquent dans la démarche pour répondre à ces besoins et les mettent en contact avec un intervenant-pivot pour les aider à accéder aux ressources ou aux programmes nécessaires. Par exemple, un intervenant-pivot peut aider une mère monoparentale dont le revenu ne suffit pas pour ses médicaments à s’inscrire au Programme de médicaments de l’Ontario, ou il peut aider un patient dont le diabète est mal contrôlé à obtenir un abonnement subventionné à un gymnase ou à accéder à un service de consultation diététique gratuit ou à un programme local de prise en charge du diabète.

Le premier et le seul essai contrôlé randomisé de prescription sociale

au Canada, le programme Accès aux ressources communautaires (ARC), financé grâce à une subvention IMPACT de l’USSO et mené dans l’Est d’Ottawa et à Sudbury, a montré la valeur de cette approche. Ces deux régions comptent un grand nombre de francophones vivant en situation minoritaire. L’essai a révélé que les services de navigation bilingues novateurs et axés sur le patient ont un impact positif sur l’accès équitable aux ressources nécessaires ainsi que sur l’expérience des patients. ARC s’est associé à Community Connexion 211 pour étendre cette approche tant nécessaire à d’autres régions de la province.

Le programme présente un grand potentiel et il a été salué par le sous-ministre de la Santé lors de la Journée scientifique de l’USSO plus tôt cet automne.

Dre Simone Dahrouge

« Nous avons été ravis que le sous-ministre ait mentionné notre programme lors de la réunion de l’USSO », a déclaré la Dre Simone Dahrouge, chercheuse à l’Institut de recherche Bruyère et dirigeante d’ARC.

« ARC était un programme communautaire destiné à combler une lacune dans la prestation des soins dans la région d’Ottawa, et sans le savoir, nous mettions sur pied un programme de prescription sociale. La prescription sociale n’était pas encore connue au Canada », a-t-elle ajouté.

Son équipe a contacté le service de connexions communautaires 211 de Collingwood, qui avait mené un projet-pilote de prescription sociale, en vue de collaborer pour intégrer les apprentissages, standardiser les outils et la formation, et développer un modèle évolutif.

Pour de nombreuses personnes, les intervenants-pivots au bout du fil offrent une oreille attentive et proposent des liens vers des ressources communautaires.

« Nous prenons le temps qu’il faut avec les clients, au fil d’une série d’appels, pour comprendre leurs besoins et cerner tous les obstacles auxquels ils sont confrontés. Les besoins sociaux sont souvent interreliés. Par exemple, des clients qui n’ont pas les moyens de payer leurs médicaments peuvent être admissibles à des programmes d’aide au paiement des services publics. Comprendre le niveau de risque des gens nous aide également à déterminer les programmes dont ils ont besoin de manière prioritaire », a expliqué Pamela Hillier, directrice générale du service de connexions communautaires de Collingwood.

« L’intervenant-pivot fournit un soutien émotionnel considérable au patient, et cela a été reconnu comme extrêmement précieux », a indiqué la Dre Dahrouge. « Grâce à une écoute active, le patient se sent entendu et développe une confiance envers l’intervenant-pivot, ce qui le rend plus enclin à agir pour répondre à son besoin. »

Le 211 est un service téléphonique national qui aide à naviguer dans les ressources disponibles en s’appuyant sur une base de données exhaustive pour trouver les ressources adéquates et aiguiller les patients vers celles-ci. Cependant, comme les patients doivent composer le 211 pour bénéficier du service, l’assistance est limitée à la durée de l’appel, et comme le 211 est un service anonyme, les intervenants-pivots ne peuvent pas consulter l’historique ou voir où en sont les clients. Cela limite leur capacité d’avoir une compréhension globale des patients aux prises avec des problématiques particulièrement complexes. L’équipe a comparé cela à la différence entre une visite à une clinique sans rendez-vous et un suivi personnalisé avec un médecin de famille.

Le service de connexions communautaires de Collingwood est l’un des cinq fournisseurs de services 211 en Ontario. Pour mieux servir les populations vulnérables, il a mis sur pied en 2015 un système d’orientation électronique pour la prescription sociale en collaboration avec l’Équipe de santé familiale de Georgian Bay. Le programme a été élargi pour accepter les renvois électroniques de dix groupes de médecine familiale ainsi que de plusieurs hôpitaux et programmes paramédicaux. Le programme se fonde sur des principes tenant compte des traumatismes et comprend des évaluations des besoins sociaux qui mesurent le changement au fil du temps.

La suite?

L’équipe de chercheurs et son partenaire à but non lucratif développent un modèle de prescription sociale évolutif, bilingue et axé sur le patient. Celui-ci combine les caractéristiques du modèle ARC aux technologies novatrices que les services de connexions communautaires 211 intègrent à leur système de navigation. Ils prévoient lancer et évaluer ce programme de prescription sociale au sein de deux équipes Santé Ontario de la région d’Ottawa enthousiastes à l’idée d’adopter un modèle du genre en 2024.

« Je veux que cela devienne un guichet unique pour n’importe quel problème de santé ou social pour tous les patients », a indiqué la Dre Dahrouge. « Nous voulons surtout joindre les personnes moins bien connectées, qui ont un plus faible niveau de littératie en santé et qui ont besoin d’aide de façon générale pour répondre à leurs besoins non médicaux. »

Voilà qui semble un remède tout indiqué.